Les Animaux Dénaturés
Lézoms... Nous descendons tous des lézoms!
Oui, nous appartenons tous bel et bien à l'espèce humaine!
L'espèce humaine... Mais qu'est-ce que cela veut dire?
Quelles différences existent-ils entre un être humain et un animal?
D'après certains anciens, l'homme se distingue de l'animal par son esprit religieux,
pris dans le sens large du terme, c'est à dire l'esprit métaphysique, l'esprit de recherche,l'inquiétude.
Cela peut résumer non seulement la foi, mais aussi la science, l'art, l'histoire, la sorcellerie, la magie,...
L'animal lui est mêlé à la nature, fibre par fibre. Il ne s'abstrait jamais des choses
pour les connaître ni les comprendre du dehors, contrairement à l'homme.
Les animaux vivent avec la nature, ils vivent en elle et n'ont pas peur d'elle!
C'est bon pour les sauvages d'avoir peur, de se poser des questions idiotes.
A quoi cela avance-t-il? S'ils ne savent pas se contenter d'exister
tels qu'ils sont, ils n'ont pas de quoi être fiers.
Ce sont des espèces d'anarchistes,
des révoltés jamais contents.
Etre homme, c’est vivre perpétuellement dans l’inquiétude et la révolte.
Alors que l'animal a continué de subir la nature, l'homme a brusquement commencé à l'interroger.
Or, pour interroger, il faut être deux: celui qui interroge, et celui qu'on interroge.
Voila pourquoi l'animal fait un avec la nature, sa nature, mais l'homme fait deux avec elle.
Pour passer de l’inconscience passive à la conscience interrogative, il a fallu ce schisme, ce divorce,
il a fallu cet arrachement. N'est-ce pas la frontière, précisément? Animal avant l'arrachement, homme après lui?
Des animaux dénaturés, voilà ce que nous sommes!
Alors que l'animal vit au sein de la Nature et fait un avec elle sans se poser de questions
et sans s’en détacher, l'homme, qui a des capacités d’abstraction et des facultés
pour former un concept, a refusé cette condition naturelle. Il s’est alors
arraché à lui-même et a progressivement cherché à comprendre .
A ce moment-là, il a constaté son ignorance,
puis a refusé cette condition d’ignorant.
Cette volonté de connaissance, qui trace la limite entre l’homme (qui refuse son ignorance)
et la bête (qui l’accepte, ou mieux encore, fait un avec elle), c’est une révolte.
Or, se mettre à part de soi-même et à part de la Nature, c’est entrer en dissidence, puis en rébellion contre la Nature.
Désormais rebelles, la Nature ne nous aide plus, elle se défend contre nous pied à pied.
Des animaux dénaturés, voilà ce que nous sommes!
Des rebelles, voilà ce que nous sommes, que nous le voulions ou non!
La seule liberté dont nous jouissions, c’est de l’être plus, ou moins, ce n’est pas autre chose.